Si ce petit duplex traversant avec balcon filant laissait présager un potentiel indéniable, tout était à refaire entre les murs traversés par des conduits de cheminée et les dénivelés.
Un petit espace agencé comme un loft
Dans le quartier de Montorgueil aux étages élevés d'un très vieil immeuble parisien, un jeune trentenaire jette son dévolu sur un petit duplex pour sa première acquisition. « L’appartement était dans un état catastrophique, entre le plancher affaissé et l'impression d'avoir été squatté, c'était un capharnaüm très vétuste » se rappelle Pauline Lorenzi Boisrond la première fois qu'elle visite les lieux avec Maxence Lesueur, l'associé de son agence d'architecture intérieure Studio Ett Hem. Missionnés par le nouveau propriétaire, il leur faudra partir de zéro pour repenser les 50 mètres carrés répartis sur deux niveaux qui composent le lieu.
Une boîte remise d'équerre
Faire de cet espace un lieu polyvalent, à la fois adapté à son usage personnel et propice à recevoir des invités pour des dîners et des rencontres conviviales. Tel est le souhait exprimé par le propriétaire pour son futur cocon. Afin d'y incorporer ces différentes fonctionnalités, les architectes doivent optimiser le moindre centimètre carré en concevant chaque élément sur mesure. Or très vite, ils se confrontent à la réalité d'un dernier étage à poutraison de bois avec des disparités de niveau et des irrégularités. « Murs, sols et plafonds ont du être remis d'équerre pour recréer la boite » explique Pauline. Il s'agit ensuite de fluidifier au maximum les circulations face à des contraintes tels des poteaux dispersés et des conduits de cheminée se faufilant entre les murs, les rendant immuables. Chaque opportunité d'ouverture ou d'arche est saisie, jusque dans la cuisine où l'importance des réceptions est prise en compte. Un îlot central équipé d'une plaque de cuisson performante et d'une hotte intégrée devient le cœur de cet espace convivial autour duquel se déploient une table à manger et un plan de travail. Le résultat ? Une circulation harmonieuse composée de passages entre le salon, la cuisine et la salle à manger, un peu à la manière d'un petit loft.
Aux angles arrondis
Dans le but d'insuffler à chaque recoin de l'espace limité une atmosphère de douceur, les formes arrondies ont été privilégiées. « Nous avons cherché à éviter les coins saillants, même dans l'utilisation du béton pour la banquette dont les angles sont légèrement arrondis pour plus de douceur. » Des habillages bois aux tablettes d'étagères, les menuiseries aussi suivent cette quête de courbes harmonieuses afin de permettre au regard de se déplacer sans être arrêté par des angles pointus. Même principe dans le choix du mobilier : la table basse de chez Popus Editions complètement ronde, celle de la salle à manger en béton organique et les chaises, à la fois accueillantes et élégamment arrondies, renforcent l'idée d'un désir des architectes de contrer cette présence d'obstacles muraux. Le choix des matériaux quant à lui se veut solide, empreint de caractère : béton, métal noir et bois foncé se disputent la vedette. Un balancier entre douceur et fermeté, un peu à l'image du titulaire des lieux.
S'étalant sur plusieurs niveaux
Lorsque l'enjeu consiste à optimiser l'espace, il est crucial de considérer le volume comme une ressource précieuse à exploiter en jouant avec les niveaux. Naturellement, lorsque le module en question à optimiser est un escalier, l'aménagement de différents paliers va de soi. « Lorsque nous avons élargi la trémie de l'escalier à pas japonais pour y nicher un tel escalier, l'espace perdu a du remplir une triple fonctionnalité. J'adore créer des niveaux, alors le linéaire en béton qui constitue la deuxième marche de l'escalier se prolonge en une banquette dans laquelle se nichent des tiroirs et finit par se transformer en canapé accueillant des coussins moelleux » poursuit l'architecte. Et comme pour accentuer la multiplicité de ses usages, l'escalier semble décliner ses matériaux à mesure qu'on le gravit : un bloc de travertin en guise de première marche, suivi de béton, puis de chêne teinté dissimulant habilement la penderie sous les marches, pour finir avec la volée en métal plié noir, contrebalançant le côté organique des trois autres matériaux.
Jusqu'à l'étage
À l'étage, la nécessité d'inclure une salle de bains et une chambre dans l'espace restreint suscite une réflexion qui ne puisse pas compromettre le côté traversant de l'appartement. Plutôt que d'opter de clore les deux espaces, un bloc de béton à plusieurs niveaux qui rappelle l'escalier abrite désormais les placards d'un côté et la douche de l'autre, avec un plan vasque et un miroir double face. Pour maximiser l'espace, la tête de lit a été pensée de manière à exploiter les zones sous les rampants : elle peut basculer, permettant de ranger aisément des objets peu utilisés. De plus, des tiroirs profonds ont été intégrés sous les tables de chevet, offrant un espace de rangement supplémentaire paré là encore de chêne teinté, pour ne rien perdre de la cohérence omniprésente. Une rénovation de fond en comble réussie pour ce petit espace sous les combles.
Article initialement publié sur AD Magazine
Par Cindy Tannoury
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